Le Vodou de l'Afrique à l'Amérique

Le Vodou est une religion originaire de l’ancien royaume du Dahomey (actuel Bénin). « Il désigne l’ensemble des dieux ou des force invisibles dont les hommes essaient de se concilier la puissance ou la bienveillance. Il est l’affirmation d’un monde surnaturel, mais aussi l’ensemble des procédures permettant d’entrer en relation avec celui-ci ». Ces rites consistent notamment à entrer en relation avec un ensemble de dieux. Le panthéon vodou est donc composé de dieux dont la plupart sont  l’incarnation ou la représentation de la puissance d’éléments de la nature ou de réalités plutôt abstraites. Ainsi, nous avons par exemple le Sakpata, dieu de la terre, le Hêviosso, dieu du tonnerre et de la foudre ou encore le Mami Wata divinité des eaux. Toutes ces entités divines seraient directement ou non issues de Mawu et Lissa, incarnation des principes originels masculin et féminin.

Parti du Bénin, le vodou s’est exporté dans le monde entier notamment en Amérique du sud et dans les caraïbes (via la traite négrière notamment)  d’où son importante présence au Brésil et en Haïti. Le vodou peut être décrit comme une culture, un art, des danses, un langage, un art de la médecine, un style de musique, une justice, un pouvoir, une tradition orale et des rites.En effet, depuis plusieurs années le vodou fait l’objet de travaux de recherches effectués par des chercheurs et universitaires à travers le monde. Il a également intégré la culture populaire tant son environnement inspire de nombreux artistes mais aussi des écrivains et des cinéastes.

Cependant, le vodou n’a pas toujours bénéficié des meilleures faveurs sur ses propres terres de naissance. En 1972, le régime mis en place à l’époque par le général Mathieu Kérékou le compare à la sorcellerie. Les rassemblements et les cérémonies étaient interdits, les adeptes traqués et jetés en prison. Ce n’est qu’en 1991 avec l’arrivée au pouvoir de Nicéphore Soglo qu’il sera restauré. C’est d’ailleurs ce dernier qui instaura en 1994 cette célébration du 10 janvier devenue la fête nationale du vaudou.

Orishas ds 1Selon les statistiques du recensement de 2002, 17% des Béninois pratiquent les religions traditionnelles alors que les chrétiens catholiques et protestants représentent 39% de la population contre 24% de musulmans. Dans la réalité, le culte du vaudou est beaucoup plus répandu. En effet, beaucoup de Béninois, même quand ils pratiquent déjà une religion importée, y restent très attachés. Ils participent aux cérémonies et y ont recours en cas de nécessité même s’ils ne le déclarent et l’assument ouvertement. Par contre les jeunes scolarisés  s’intéressent moins que leurs ainés aux religions traditionnelles, car ils sont tous tournés vers l’ouest. "Avec la mondialisation, l’expansion des religions importées et surtout l’expansion des églises évangéliques et le « dieu business », les jeunes se sont détournés des couvents, tournant ainsi dos à leur croyance originelle", explique Barnabé, 23 ans, étudiant en philosophie. "Ce qui créé un tort pour ces jeunes qui n’ont plus de repères culturels et identitaires".

Adeptes de religions importées, plusieurs jeunes béninois tendent à renier les religions traditionnelles qu’ils jugent rétrogrades et diaboliques. Pour Ahmed, 19 ans, "le vodou, c’est l’œuvre du diable."

Si certains jeunes s’en cachent, d’autres, en revanche, n’hésitent pas à arpenter les couloirs des temples vodous pour trouver des solutions rapides aux difficultés qui les assaillent au quotidien. Face à des problèmes d’emploi, de réussite sociale, de promotion professionnelle, beaucoup de jeunes ont recours aux prêtres vodous. "Ce que nous ne trouvons pas à l’église, nous allons le chercher dans les couvents traditionnels et ça marche !", lance Joël, 23 ans.

Pour ce faire, Henri, 19 ans, conseille aux jeunes "de ne plus dénigrer le vodou. Imprégnons-nous de ses concepts, bases de notre spiritualité profonde et de notre identité, en tant qu’Africains, en tant que Béninois."Comme beaucoup de rites africains, le vodou béninois se retrouve confronté à l’occidentalisation des mœurs africaines.

Pourra t-il résister à tous ces bouleversements, comme ce fut le cas du vodou Haïtien qui a traversé l’esclavage et plusieurs occupations.

Harpers weekly haiti voodoo executions 1864En effet le vodou joua un rôle primordial dans le combat quotidien que menait l'esclave transplanté d'Afrique pour conserver non seulement sa santé mentale dans un système, à tous les égards, deshumanisant, mais aussi et surtout pour rester connecter avec sa terre ancestrale et conserver son identité. Sa pratique considérée subversive par le colon a été longtemps diabolisée, et interdite, voyant ses adeptes traqués, il se pratiquait donc dans la clandestinité. Plus tard, il devint le catalyseur dans l'organisation des révoltes contre les français. Les historiens reconnaissent que la cérémonie du Bois-Caïman dans la nuit du 21 au 22 Août 1791 marqua le début de l'insurrection des esclaves de Saint-Domingue.

De cette époque jusqu'au mois d'avril 2003 quand un arrêté du gouvernement de Jean-Bertrand Aristide le déclara "religion à part entière", le vodou ne jouissait d'aucune reconnaissance légale. Plusieurs gouvernements ont essayé d'interdire sa pratique. Il fut l'objet de persécutions ouvertes et officielles pendant la fameuse campagne « antisuperstitieuse » sous le gouvernement d'Elie Lescot, ou sournoises après la chute du gouvernement de Jean-Claude Duvalier et, sur une base presque quotidienne, par des ministres des cultes reformés. En 2011, les vodouisants, dans certaines régions, furent accusés d'être les agents de propagation du choléra. Certains furent traqués et assassinés par des ignorants.

Haiti vodou cultePendant l'occupation américaine, la machine de propagande de l'occupant fit du vodou un « obstacle à la civilisation » et un champ où s'épanouit le démon.

N'empêche que les vodouisants n'avaient cure de ces dangers ou des critiques, et continuaient de pratiquer leur culte en privé ou publiquement. Alors que d'autres, pratiquants ou non, le célébraient à travers des expressions culturelles comme les danses folkloriques, la musique dite "racine". Certains gouvernements l'utilisaient même à des fins purement politiques.

Après plusieurs siècles de diabolisation et de persécution l'arrêté du 4 Avril 2003 du gouvernement de Jean Bertrand Aristide vint placer sous la protection des lois et institutions du pays au même titre que toutes les autres religions le vodou haïtien.

Par Ayong

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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