La ministre tchadienne de la Production, de l'Irrigation et des Equipements agricoles, Lydie Beassemda, a lancé vendredi la campagne agricole 2018-2019, alors que la précédente a été déficitaire et qu'une partie de la population est menacée par l'insécurité alimentaire et nutritionnelle.
"La campagne 2017-2018 s'est caractérisée par un démarrage précoce anormal, avec des cumuls pluviométriques globalement supérieurs à la normale, d'une part, et des pluies mal réparties dans le temps et l'espace, d'autre part", a déclaré Mme Lydie Beassemda. "Dans cette situation peu favorable, 4.674.331 hectares de toutes espèces confondues de cultures ont été emblavées, soit une baisse de 10,30% par rapport aux superficies emblavées durant la campagne agricole précédente, pour récolter 4.451.451 tonnes", a-t-elle ajouté.
Les résultats définitifs de la campagne agricole 2017-2018 présentent une production céréalière de 2.716.900 tonnes, en baisse de 2,1% par rapport à la moyenne quinquennale et de 5% par rapport à la campagne 2016-2017, révèle le dernier bulletin d'information sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle publié en mars 2018 par le Système d'information sur la sécurité alimentaire et d'alerte précoce au Tchad (SISAAP). Les baisses les plus importantes par rapport à la moyenne quinquennale ont été enregistrées dans la plupart des régions de la zone sahélienne, à cause du début tardif de la campagne, de séquences sèches assez longues et de l'arrêt précoce des pluies. La production céréalière du pays se répartit comme suit : sorgho (35%), mil (24%), bérébéré (16%), maïs (15%) et riz (10%).
Le bilan céréalier dégage un déficit net de 112.184 tonnes. La disponibilité apparente est de 154 kg/personne/an, en baisse par rapport à l'an dernier (173 kg/personne/an) et en deçà de la norme de consommation pour le Tchad (159 kg/personne/an).
La situation pastorale a été marquée par d'importants déficits fourragers dans les régions de Wadi Fira, Ouaddaï, Batha, Bahr El Ghazel, Ennedi Est, Guéra, Ennedi Ouest, Hadjer-Lamis et Borkou. Cette situation avait provoqué une descente précoce des transhumants (dès le mois de septembre), engendrant une forte concentration du bétail dans les zones les plus pourvues en pâturage et de fréquents conflits entre les agriculteurs et les éleveurs.
Selon l'analyse de la situation alimentaire et nutritionnelle de l'outil Cadre harmonisé d'identification et d'analyse des zones à risques et des populations en insécurité alimentaire et nutritionnelle du mois de mars 2018, dans la période courante (mars-mai 2018), aucun département n'est classé en "phase famine" ou en "phase urgence", mais huit départements sont en "phase crise", quinze autres en "phase sous pression" et trente-huit autres encore en "phase minimale".
Aucune population n'est en "phase famine", mais 17.084 personnes sont identifiées comme en "phase urgence" et 606.897 autres en "phase crise". Ces personnes nécessitent une assistance humanitaire, notamment une aide alimentaire gratuite et d'autres activités de renforcement de la nutrition, de la santé, des moyens d'existence et des capacités de résilience.
Les populations en phase "sous pression", estimées à plus de 2 millions de personnes, et celles en "phase minimale", estimées à plus de 10 millions de personnes, n'ont pas besoin d'assistance humanitaire immédiate, mais nécessitent un soutien pour renforcer leur résilience et développer leurs moyens d'existence.
Pour la période projetée de juin à août 2018, aucun département ne sera en "phase famine" ou en "phase urgence", mais 19 départements seront en "phase crise", 19 autres départements en "phase sous pression" et 31 en "phase minimale".
Aucune population ne sera en "phase famine" ; cependant, 34.038 personnes seront en "phase urgence" et 956.668 personnes en "phase crise". Ces personnes nécessiteront une assistance humanitaire, notamment une aide alimentaire gratuite, des ventes à prix modérés et d'autres activités de relèvement et de renforcement de la nutrition, de la santé, des moyens d'existence et des capacités de résilience.
Les populations en "phase sous pression", estimées à près de 3 millions de personnes, et celles en "phase minimale" (environ 9,7 millions de personnes) n'auront pas besoin d'une assistance humanitaire immédiate, mais nécessiteront un soutien pour renforcer leur résilience, développer leurs moyens d'existence et maintenir le taux de malnutrition aiguë à des niveaux acceptables.
"Au moins dix-huit départements administratifs de la zone sahélienne du Tchad basculeraient en phase crise pendant la période allant de juin à août, si des mesures appropriées n'étaient pas préconisées en faveur des populations classées en phase crise et en urgence pendant la période courante (mars-mai)", prévient le document du SISAAP.
Sur la base des résultats définitifs de la campagne agro-pastorale 2017-2018 et de l'atelier du Cadre harmonisé, les principaux acteurs de la sécurité alimentaire, de la nutrition et du pastoralisme se sont réunis les 30 et 31 mars, pour mettre à jour le plan national de réponse (PNR) en soutien aux populations en insécurité alimentaire et nutritionnelle. Le coût global de ce plan est évalué à plus de 75 milliards de francs CFA (135 millions de dollars). Si des mesures appropriées ne sont pas prises pour la mise en œuvre du PNR pendant la période courante (mars-mai), la situation risquerait de se détériorer et le coût de la réponse passerait alors de 75 à près de 92 milliards de francs CFA (165 millions de dollars).