Stephen Bantu Biko, dit Steve Biko, est né le 18 décembre 1946 à King William's Town dans la province du Cap, Steve Biko rejette rapidement la politique d’apartheid à cause de son frère, arrêté en 1963 pour militantisme anti-apartheid.
Étudiant à l'université de médecine du Natal où il est élu au conseil représentatif des étudiants « noirs », Biko est délégué en 1968 à la Conférence de la National Union of South African Students (NUSAS) à l'Université de Rhodes.
Révolté par sa condition de « noir » dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, il milite pour un mouvement exclusivement « noir » au contraire de la NUSAS largement ouverte aux étudiants libéraux « blancs ».
En 1969, à l'université du Nord près de Pietersburg, il participe aux côtés de nombreux étudiants « noirs » du Natal à la création de la South African Students Organisation (SASO, Organisation des Étudiants sud-africains), et en devient le premier président élu.
Le SASO était l'un des principaux représentants du Black consciousness movement (Mouvement de Conscience « noire ») dont Biko était l'initiateur.
Biko et le Black Consciousness movement critiquent l'ANC et les libéraux « blancs », préconisant une émancipation des « noirs » par eux-mêmes, en affirmant que, même s'ils sont de bonne volonté, les « blancs » ne peuvent comprendre entièrement le point de vue des « noirs » sur la lutte à mener, car l’oppresseur ne peut se mettre à la place de l’opprimé. De ce fait, il se prononce contre l'intégration des « noirs » dans le système de l’apartheid « blancs », se déclarant contre « le fait qu'une minorité de colons impose un système entier de valeurs aux peuples autochtones ».
Pour lui, la libération psychologique doit précéder la libération physique, « les « noirs » ne peuvent se libérer politiquement de l’apartheid que s’ils cessent de se sentir inférieurs aux « blancs ». C'est pourquoi, ils ne doivent, ni ne peuvent compter sur l’aide ou l’assistance de « blancs » et doivent cesser de participer à tout mouvement incluant des « blancs » ». L'idée que les « noirs » puissent ainsi déterminer de leur propre destinée et le principe de la fierté de la conscience « noire » eurent un grand retentissement alors que les lois d'apartheid étaient à l'apogée de leur mise en œuvre.
La pensée de Biko est ainsi influencée par celle d'autres grands leaders de l'émancipation des « noirs », tels W.E.B. DuBois, Marcus Garvey, Alain Locke, Frantz Fanon et les penseurs de la « Négritude », comme Aimé Césaire. Biko développe cette doctrine en adaptant le slogan des Black Panthers américains « black is beautiful », préconisant aux « noirs » de croire en leurs capacités et de prendre en main leur destinée. Attentif à la pensée de Gandhi et de Martin Luther King, Biko employait des techniques de non-violence, mais davantage en tant que moyen stratégiquement efficace de lutte face à l'appareil répressif de l'État ségrégationniste.
Malgré cette stratégie non-violente, le pouvoir « blanc » ne pouvait accepter l’émancipation et une conscience propre à des gens qu’ils considéraient comme des sous hommes. La SASO fut assimilée à une organisation terroriste. Il déclara « La plus grande arme dans les mains de l’oppresseur est l’esprit de l’opprimé ».
En 1972, la SASO se prononça contre toute coopération avec les leaders « noirs » impliqués dans le système de l'apartheid. Biko qualifia de « collaborateurs » tous les « noirs » travaillant pour le régime raciste « blanc » soutenu par l’occident. La même année, Biko lance la Black Peoples Convention (BPC), version post-étudiante de la SASO.
En 1973, il est détenu sous l'accusation de terrorisme avec d'autres membres de la Conscience « noire », alors que les écoles sont progressivement politisées par les membres de son organisation et que se développent les tentatives de boycotts et de fermetures d'écoles. Le régime réagit violement pour réprimer toute tentative d’émancipation et Biko est alors banni et assigné à résidence dans sa région du Cap-Oriental. Il est empêché de tenir des discours en public et de parler à plus d'une personne à la fois. Dans le même temps, le mouvement de Steve Biko prend de l’ampleur ce qui agace le régime en place et Biko devient un homme à abattre.
En juin 1976, cette évolution débouche sur des soulèvements populaires dans tous les townships du pays, à mesure que se durcit la répression sanglante des forces de sécurité du régime raciste. Son mouvement organise notamment la révolte des écoliers contre l'imposition de l'éducation en afrikaans la langue des blancs, ce qui aboutira au massacre de Soweto. En effet à neuf heures et demie du matin, ces jeunes commencent à se réunir autour de banderoles. Ils ont pour but de protester et d'exprimer leurs opinions pacifiquement et il est convenu que tout affrontement avec la police doit être évité.
Mais la police avait reçu la consigne du ministre de la Justice, Jimmy Kruger, de « rétablir l'ordre à tout prix et d'user de tous les moyens à cet effet ».
Après les sommations demandant à la foule de se disperser, elle ouvrit le feu sans distinction sur la foule désarmée.
Le bilan est officiellement de 23 morts et 220 blessés, mais le bilan réel n'est pas vraiment connu. On parle de plusieurs centaines de morts, et on avance parfois 600 morts dont 99% de noirs. Bon nombre de victimes furent touchées de balles dans le dos. L'un des premiers morts, Hector Pieterson, un jeune garçon de 12 ans, devint le symbole de la répression aveugle du régime.
Biko est d'abord mis au secret pendant 101 jours puis, bravant les interdictions de séjour, il sillonne le Cap-Oriental. C'est à cette époque qu'il se lie d'amitié avec le journaliste progressiste Donald Woods qui écrira sa biographie.
Steve Biko est arrêté par la police le 18 août 1977. Emmené à Port Elizabeth où il est torturé, et ensuite transféré à Pretoria, Transvaal, le 11 septembre 1977.
Le 12 septembre 1977, Biko meurt en détention, officiellement des suites d'une grève de la faim.
Le prêche lors de ses funérailles est assuré par Desmond Tutu, futur Prix Nobel de la paix, alors proche de la Black theology (consience « noire »)
Les conditions de détention ainsi que le décès brutal de Steve Biko font l'objet d'une polémique internationale qui débouche sur la condamnation du régime sud-africain. Après son décès, Steve Biko devint le symbole de la résistance « noire » face à la cruauté du pouvoir « blanc ».
Aux questions de la députée libérale Helen Suzman sur la mort de Biko, la réponse du ministre de la justice, Jimmy Kruger, résonna à travers le monde entier : « la mort de Steve Biko me laisse froid ». Les policiers concernés ne reçoivent qu'un blâme dans un premier temps alors que les médecins impliqués sont pris à partie par leurs collègues. La police finira par confesser le meurtre de Steve Biko à la Commission vérité et réconciliation à la fin des années 1990.
Le 7 octobre 2003, soit près de dix ans après l'avènement d'un régime multiracial en Afrique du Sud, la justice sud-africaine renonce à poursuivre les cinq policiers pour manque de preuves et absence de témoins. Steve Biko, mort en martyr repose dans le petit cimetière de sa ville natale, King William's Town, dans la province du Cap-Oriental.
Il avait été, selon Nelson Mandela, le « premier clou dans le cercueil de l'apartheid », et demeure un héros mythique pour des millions d’africains désirant s’émanciper de la domination coloniale.
Par Ayong